(Dossier) Quel est l’impact de la désalinisation sur l’environnement ?
Réchauffement climatique, assèchement des nappes phréatiques, montée du niveau des océans, sécheresses à répétition, raréfaction de l’eau potable… l’Homme du 21ème siècle est face à une situation qu’il va devoir résoudre rapidement. Pour certains, comme dans les pays du Golf, la solution passe par la désalinisation de l’eau de mer. Le problème est que pour chaque litre d’eau douce produit, c’est 1,5 litre de « saumure » chargée de produits chimiques qui est rejeté dans l’environnement. Alors est-ce vraiment la solution ? Y a-t-il un impact sur l’environnement ? Quelles sont les autres solutions possibles ? Explications dans ce dossier spécial…
Accéder à l’eau potable pour toute la planète, une utopie ?
Le manque d’eau potable devient une crise majeure pour de nombreuses régions du monde. Selon les Nations unies, 1,5 à 2 milliards de personnes vivent dans une région où l’eau est rare et fait défaut. Le dessalement est devenu un procédé très utilisé pour lutter contre cette sécheresse, mais il peut avoir de graves répercussions sur l’environnement en cas de surutilisation.
En réaction, d’importants efforts de recherche ont été menés au cours des dernières décennies pour développer de meilleurs procédés de traitement de l’eau, analyser les techniques et créer des instruments de contrôle automatique afin de maximiser la productivité et de réduire l’impact environnemental. Si nous pouvons réaliser de nouvelles avancées dans ce secteur technologique, nous pourrons assurer la durabilité des sources d’eau potable et préserver le statu quo naturel de notre planète.
Ces dernières années ont vu une révolution dans la manière de traiter l’eau, avec l’apparition de nouvelles techniques de séparation par membrane très efficaces.
Au lieu d’utiliser des réactifs chimiques pour éliminer les polluants, elles s’appuient sur un processus physique qui est remarquablement fiable et réussit même dans les eaux fortement contaminées. Cela signifie que beaucoup moins de résidus pénètrent dans nos rivières et nos lacs, tout en permettant de produire une eau extrêmement pure.
En effet, ces techniques ne nécessitent qu’une utilisation limitée de réactifs chimiques, bien que cela puisse être nécessaire lors des processus de maintenance. Avec de telles avancées dans le traitement de nos précieuses ressources comme l’eau, il y a lieu de faire preuve d’un optimisme renouvelé quant à la préservation de notre environnement naturel pour les générations futures.
Quels impacts pour la planète ?
Le dessalement est le processus qui consiste à retirer les minéraux dissous de l’eau de mer pour la rendre potable. Ces derniers temps, la croissance démographique et le changement climatique affectant la disponibilité des sources d’eau douce, les unités de dessalement se sont multipliées.
Pour chaque litre d’eau douce produit, c’est 1,5 litre de « saumure » chargée de produits chimiques qui est rejeté.
rapport de l’ONU
Selon un rapport de l’ONU, 95 millions de mètres cubes d’eau douce sont produits chaque jour par les unités de dessalement dans le monde. Si ce processus s’est avéré vital pour permettre l’accès à l’eau potable dans les pays arides, il a néanmoins des implications environnementales qui ne peuvent être ignorées. En voici quelques-unes :
Impact sur la température des océans
L’un des principaux impacts environnementaux du dessalement est l’augmentation de la température des océans due à la pollution thermique. La saumure qui est rejetée dans l’océan par une usine de dessalement peut être jusqu’à 4°C plus chaude que l’eau de mer environnante. Cela entraîne une augmentation de la température locale de l’océan qui peut être préjudiciable aux récifs coralliens voisins et à d’autres espèces marines sensibles. En outre, la saumure étant plus dense que l’eau de mer ordinaire, elle s’enfonce dans les profondeurs et continue de diffuser sa chaleur dans la colonne océanique au fil du temps. Ce phénomène peut également perturber les schémas normaux de circulation océanique, ce qui peut causer des dommages supplémentaires à la vie et aux écosystèmes marins si rien n’est fait.
Impact sur la vie marine
Les rejets d’une usine de dessalement ne contiennent pas seulement de l’énergie thermique, mais augmentent également les concentrations de divers sels dissous dans la zone environnante ainsi que d’autres polluants tels que les chlorures et les métaux lourds comme le mercure ou le plomb, qui sont libérés lorsque l’eau salée traverse les membranes d’osmose inverse au cours du processus de dessalement.
Ces polluants peuvent s’avérer toxiques pour certaines espèces marines et perturber leurs habitats, entraînant une diminution de la biodiversité, voire des extinctions locales, si des précautions ne sont pas prises lors des processus d’exploitation et d’élimination dans les usines de dessalement.
La désalinisation par ultrafiltration
Le dessalement par ultrafiltration est une méthode de plus en plus populaire pour produire de l’eau potable à partir de sources autrement inadéquates. Le procédé utilise des fibres extrêmement fines qui ne laissent passer que les particules plus petites que la taille des pores. Par conséquent, les grosses molécules organiques et les substances adsorbées sur les grains de carbone sont trop grosses pour pénétrer et sont donc filtrées hors de la source d’eau disponible.
Cette technique fonctionne sans qu’il soit nécessaire d’utiliser des désinfectants chimiques et est utilisée avec succès en France depuis 1997. Elle est également capable de réduire les goûts désagréables, les odeurs et autres contaminants dangereux pour la santé présente dans diverses sources d’eau. L’ultrafiltration est donc une technologie bénéfique qui pourrait jouer un rôle important dans l’approvisionnement en eau potable des personnes vivant dans des régions où l’accès aux sources d’eau propre est limité.
La désalinisation par nanofiltration
La nanofiltration est une méthode utile de traitement de l’eau qui utilise une membrane aux pores minuscules pour filtrer les impuretés. Ce procédé a été développé à la fin du vingtième siècle et est mis en pratique en France depuis 1999. Il élimine efficacement tous les polluants dissous, y compris les minéraux, sans recourir à l’adsorption par du charbon actif. Le seul inconvénient de cette technique est qu’elle crée un produit trop pur pour être utilisé directement, ce qui nécessite une reminéralisation avant l’utilisation pour l’approvisionnement des ménages ou des systèmes d’irrigation agricole.
Les autres solutions possibles ?
Il existe plusieurs techniques différentes pour le dessalement de l’eau de mer, chacune ayant ses propres avantages et inconvénients.
L’osmose inverse (OI)
L’osmose inverse (OI) est un procédé de dessalement à base de membrane qui sépare les molécules de sel des autres composés de l’eau de mer. Il repose sur le principe de la pression osmotique pour pousser le sel à travers une membrane semi-perméable. La pression de fonctionnement nécessaire pour pousser le sel à travers cette membrane peut être très élevée (jusqu’à 100 bars). Cela en fait l’un des procédés de dessalement les plus gourmands en énergie, mais aussi l’une des méthodes les plus efficaces et les plus fiables qui soient.
Le principal avantage de l’osmose inverse est sa simplicité ; elle est capable d’éliminer les sels de l’eau de mer en une seule étape, sans nécessiter de traitements ou de procédés chimiques supplémentaires. Le principal inconvénient de l’osmose inverse est son coût ; en raison de la pression de fonctionnement élevée requise, son installation et sa maintenance peuvent être coûteuses
Autres techniques de dessalement
Il existe plusieurs autres méthodes qui peuvent être employées en fonction des exigences ou des objectifs spécifiques. Il s’agit notamment de la distillation, de l’électrodialyse, de l’échange d’ions et de l’élimination des carbonates.
La distillation
La distillation consiste à faire bouillir l’eau de mer pour produire de la vapeur qui est ensuite condensée en eau potable. Elle est relativement simple et peu coûteuse par rapport à l’OI, mais elle nécessite de grandes quantités d’énergie et produit des niveaux élevés d’eaux usées qui doivent être gérées correctement afin d’éviter la pollution.
L’électrodialyse
L’électrodialyse consiste à faire passer un courant électrique dans l’eau salée afin de séparer les ions en fonction de leur charge. Cette méthode nécessite moins d’énergie que la distillation mais produit de grandes quantités de saumure résiduelle qui doit être éliminée de manière appropriée.
L’échange d’ions
L’échange d’ions utilise des résines à charge positive ou négative pour absorber les ions chargés de l’eau salée ; cette méthode nécessite moins d’énergie que l’osmose inverse, mais son coût est plus élevé en raison de la nécessité de remplacer ou de régénérer périodiquement les résines.
Comment réutiliser la saumure ?
La réutilisation d’une solution de saumure implique sa régénération. Ce processus nécessite de réapprovisionner la saumure en sel, en salpêtre, en sucre ou en sel nitrité, selon le sel initialement utilisé dans la préparation. Afin de s’assurer que la saumure est fonctionnellement similaire à celle utilisée à l’origine, ce processus de régénération doit être réalisé avec le plus grand soin et la plus grande précision. La clé d’une réutilisation réussie de la saumure réside dans sa régénération minutieuse.
Conclusion
La conclusion que l’on peut tirer de l’analyse du processus de dessalement est que, bien qu’il constitue une solution importante pour l’accessibilité à l’eau potable dans les régions connaissant des pénuries d’eau, il existe des implications environnementales qui doivent être prises en considération. Compte tenu du réchauffement de l’océan dû à la pollution thermique, ainsi que de la contamination de la vie marine par les produits chimiques libérés par les membranes d’osmose inverse, il est clair que toute décision de poursuivre des opérations de dessalement à grande échelle doit inclure des procédures d’atténuation des dommages environnementaux.
Malgré ces problèmes, et compte tenu de l’augmentation de la population, de l’évolution du climat et de la pression accrue sur les sources d’eau douce existantes dans le monde, le dessalement reste un élément essentiel pour garantir l’accès à l’eau potable aux communautés humaines.
Sources
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